dimanche 4 décembre 2016

Armées d'Hier 01 - Les Mérovingiens

Armées d'Hier 01 : Les Mérovingiens

I. Présentation historique


Un officier romain d'origine barbare, Flavius Odoacre, dépose en 476 l'Empereur Romulus Augustus. Si ce n'est pas exactement l'effondrement effectif de l'Empire Romain, puidsqu'Odoacre répond désormais en théorie à l'Empereur romain d'Orient Zénon, cela marque tout de même un grave affaiblissement de l'Empire dans sa partie occidentale. Odoacre onserve dans les faits une partie de la botte italique au nom de l'Empereur, mais les peuples dits "barbares", installés en Gaule depuis le début du Ve siècle pour servir en tant qu'auxiliaires de l'armée romaine pour la protection du limes, se bousculent à partir de cet effacement de l'autorité. On compte déjà Alamans, Burgondes, Francs ou encore Wisigoths dans la France qui est loin d'exister à l'époque.


Clovis (466-511), fils de Childéric 1er et petit-fils du mythique Mérovée, qui a donné son nom à la dynastie, devient roi des Francs Saliens en 481. Il attaque quelques années plus tard le Romain Syagrius, qualifié de rex Romanorum (roi des Romains) par Grégoire de Tours (539-594), et capture son royaume ainsi que sa capitale, Soissons. Il étend son royaume, se fait reconnaître comme roi par les autres peuplades franques, et se lie par le mariage aux autres rois. Ses descendants et lui vainquent et soumettent les Alamans (506) et les Burgondes (534), tout en se faisant plus ou moins reconnaître par les Bretons et les Saxons et en affrontant les Wisigoths.


Malgré toutes les conquêtes les portant de Soissons aux Alpes et aux Pyrénées, les partages successifs du royaume après la mort de Clovis (511), de Clotaire 1er (561), de Clotaire II (629) et de Dagobert 1er (639), ainsi que les rivalités violentes entre frères, affaiblissent le regnum Francorum, et celui-ci cesse de s'étendre. Des entités territoriales apparaissent plus ou moins indépendantes, gouvernées par des magister palatii (maître du palais), en théorie dépendants du roi, qui a en réalité perdu tout son pouvoir au profit des Grands à partir du VIIe sicèle : on les appelle "rois fainéants", car ils ne font rien. Les rivalités tournent autour des maires du palais de Neustrie (nord-ouest), de l'Austrasie (nord-est), de la Burgondie (sud-est) et de l'Aquitaine (sud-ouest), et ce seront les Carolingiens d'Austrasie qui prendront l'ascendant au milieu du VIIIe siècle.

II. L'armée mérovingienne

a) Organisation

Tous les hommes libres et Francs sont censés pouvoir être appelés à tout moment pour une expeditio (campagne militaire). Ils doivent s'équiper à leurs frais, et s'entretiennent eux-mêmes par leur richesse ou sur le terrain par le pillage. Ils sont contraints de payer une amende s'ils ne répondent pas à l'appel. On organise aussi quand il le faut des levées provinciales, donc des Gallo-Romains ou un des peuples soumis au regnum


Le roi et les Grands comptent dans leur suite des antrustions, ou leudes, c'est-à-dire des compagnons de guerre toujours disponibles à leur côté.  Cette sorte de garde personnelle est différente des levées à convoquer par le roi ou par un des Grands (duc ou comte). Le roi compte ainsi sur son armée privée (compagnons et hommes levés sur ses terres), et sur celles des Grands du regnum, qui utilisent les mêmes mécanismes. Dans la lignée de la tradition romaine, la revue et l'inspection des troupes a encore une place dans la guerre mérovingienne, comme l'épisode peut-être légendaire de Soissons le montre.

b) Armement et tactique

D'après l'historien byzantin Procope de Césarée (500-565), les élites franques à cheval portent la lance, et la majorité des guerriers à pied portent l'épée, le bouclier et la hache. Les Francs se sont fait particulièrement connaître militairement par l'usage de cette dernière, appelée francisque. Il s'agit d'une hache de combat pesant un peu plus d'un kilo, avec un manche de bois de 40 cm de long sur lequel un morceau de fer de 18 cm de long est placé. Elle pouvait être projetée en avant par des rotations jusqu'à 12 mètres. Les guerriers pouvaient porter un petit bouclier fait en lattes de bois et surmonté de cuir d'environ 80-90 cm de diamètre. Quant à l'épée, il peut s'agir d'une spatha, une arme à double tranchants, d'une longueur comprise entre 75 et 90 cm. On trouve aussi des semispatha de 40 cm de long et des épées à un seul tranchant, les plus connues étant les fameuses scramasaxes, sortes de coutelas.



D'après Agathias le Scolastique (530-594), le continuateur de l'oeuvre de Procope, les Francs se battent généralement nus jusqu'à la ceinture, et portent des vêtements en peau et en toile, ainsi qu'une lance et une hache à double tranchants (la francisque). Toujours d'après Agathias, cette lance, qui peut s'apparenter à un javelot, se finit par une pointe assortie de crochets : ainsi, le Franc peut projeter son arme sur le bouclier adverse, et s'appuyer sur la lance qui y reste coincée pour forcer le bouclier et le bras ennemi qui le tient à pencher vers le bas, pour ensuite percer le corps sans protection avec un autre javelot ou fracasser la tête avec la francisque. Agathias fait référence à l'angon, une lance à tige de fer mince d'1 mètre 25 avec une tête de fer à crochets. Les plus longs pouvaient mesurer jusqu'à 2m15. 


Représentation d'un guerrier franc "idéal".

Les troupes les plus riches étaient généralement à cheval, et pouvaient porter une cotte de mailles à la romaine ou une casaque de cuir couverte d'écailles en métal, ainsi qu'un casque consistant en une calotte de fer recouverte de cuir. Pour ce qui est de la tactique, elle reste sommaire. En 1.12.1-2, Agathias mentionne un groupe de guerriers francs à bouclier couverts sur les flancs par deux ailes de cavalerie. En 2.5.4, ceux-ci chargent leur adversaire en formation delta, c'est-à-dire en coin, ou encore en triangle, pointe tournée vers l'ennemi. La charge de ces Germains armées de francisques et d'angons est dévastatrice.

Conclusion

Les armées privées du roi et des Grands, complétées par des levées franques, mais aussi des autres peuples sous domination franque, forment l'armée mérovingienne. L'infanterie germanique franque a une puissance de choc impressionnante, manquant néanmoins de protection, et la possession d'une armure et d'un cheval reste réservée aux plus riches. Les campagnes militaires sont courtes, et le pillage pour se ravitailler en nourriture est la norme.

Sources :

- AGATHIAS le Scolastique, Histoire de l'Empereur Justinien, traduit du grec par M. Cousin, 2.3.3, 2.5.4
- PROCOPE de Césarée, Histoire de Constantinople, traduit du grec par M. Cousin, 25.2

Bibliographie :

CONTAMINE, Philippe, CORVISIER, André (dir.), Histoire Militaire de la France. Tome Premier : Des Origines à 1715., PUF, Paris, 1992, 632 pages

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